Festival absolument novateur, centré sur le public et le rôle du spectateur, le GIFF revient du 3 au 12 novembre pour sa 29e édition, avec une section immersive comprenant 28 œuvres, dont dix premières mondiales.
Événement attendu par beaucoup, le GIFF est un festival qui met réellement la valeur des histoires au centre, en montrant les multiples façons de les raconter, sans hésiter à comparer les différentes technologies.
Il s’accompagne à nouveau du Geneva Digital Market qui, avec ses nombreuses conférences et ses deux sessions immersives consacrées aux productions internationales et suisses, ouvre la réflexion sur les principaux enjeux des technologies immersives et de l’audiovisuel aujourd’hui, et aborde de front le sempiternel problème de la distribution des œuvres.
Nous avons discuté de la prochaine édition avec sa directrice exécutive et artistique, Anaïs Emery, et voici ce qu’elle nous a dit.
Cover: THE EYE & I, Jean-Michel Jarre & Hsin-Chien Huang
La narration au cœur du monde audiovisuel
ANAÏS EMERY – Ce qui unit les différentes sections du GIFF, le fil rouge de ce festival, c’est la chose la plus simple, mais la plus importante : le besoin de l’humanité de raconter des histoires. La raison d’être de notre événement, sa mission, est d’examiner les œuvres audiovisuelles contemporaines et de déterminer quelles sont les histoires les plus innovantes, celles qui offrent les plus grandes opportunités en termes de liberté d’expression, celles qui nous permettent d’élever l’humanité et de raconter de nouvelles choses à son sujet. Trouver de nouvelles voix, de nouvelles visions ou même de nouvelles façons de raconter des histoires, comme l’interactivité et l’immersivité.
Nous nous intéressons aux nouvelles technologies précisément de ce point de vue : non pas comme une fin en soi, mais comme un nouvel outil pour raconter des histoires et partager des récits qui sont fondamentaux pour comprendre un monde qui devient de plus en plus compliqué à analyser, en raison de la quantité d’informations dont nous disposons.
C’est pourquoi la narration est toujours au centre de nos choix, même en termes de programmation, précisément parce qu’elle nous permet de représenter le monde dans sa plus grande diversité.
Mais, comme nous l’avons dit, nous voulons aussi présenter des voix diverses : le rôle d’un festival est aussi de faire connaître des points de vue qui, surtout aujourd’hui, ne sont pas facilement accessibles au public. Encore une fois, la particularité de notre programme immersif est qu’il a toujours été ouvert au public. Dans de nombreux festivals – et je ne dis pas cela dans un sens critique, mais simplement pour souligner la différence – les programmes immersifs ou innovants sont principalement ouverts aux professionnels. Au contraire, la vision que nous avons au GIFF est que le public doit également être considéré comme un expert : un expert de lui-même, en tant qu’être humain, mais aussi un expert de l’audiovisuel, qu’il apprécie constamment.
La complexité d’un festival convergent
A. E. – Le GIFF rassemble toutes les manières de raconter des histoires, et compare même de manière compétitive (voir la compétition Convergent competition: Future is Sensible) différents médias.
Il est complexe de travailler en ces termes, d’autant plus que notre sélection recherche constamment des visions originales ou inspirées de l’avenir et des œuvres audiovisuelles dont la production est particulièrement innovante. Nous nous intéressons donc à des œuvres qui sont elles-mêmes complexes à trouver.
Les réunir dans un même festival est à mon avis une démarche très audacieuse. Mais nous le faisons parce que nous pensons que pour faire progresser la culture de l’audiovisuel, il faut aller plus loin, développer une compétition qui mette en relation les différences et où la comparaison ne se fait pas sur le type de technologie utilisée, mais sur la qualité de l’œuvre mesurée dans sa capacité à exprimer au mieux des visions spécifiques de l’avenir.
Parfois, un film peut mieux réussir cette tâche qu’une œuvre immersive, parfois une série est plus efficace. Je dirais que c’est le thème qui unit les différentes œuvres de notre sélection. Et il est toujours intéressant d’observer l’attitude du jury face à cet ensemble de propositions.
La raison d’être de notre événement, sa mission, est d’examiner l’audiovisuel contemporain et de déterminer quelles sont les histoires les plus innovantes, celles qui offrent les plus grandes opportunités en termes de liberté d’expression, celles qui nous permettent d’élever l’humanité et de raconter de nouvelles choses à son sujet. Trouver de nouvelles voix, de nouvelles visions ou même de nouvelles façons de raconter des histoires, comme l’interactivité et l’immersivité.
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Une approche innovante du système de jury
A. E. – Au GIFF, nous avons un système de jury assez innovant. Pour les films, il n’y a qu’une seule personne jouant un rôle important dans le domaine : ils sont rejoints par des étudiants universitaires qui étudient la théorie mais pratiquent également le cinéma en Suisse. En effet, il est très important pour nous d’intégrer la vision de ceux qui travaillent déjà aujourd’hui à celle des réalisateurs, journalistes et producteurs de demain. Et puis, bien sûr, nous voulons aussi être plus inclusifs en termes générationnels, parce que la génération montante, qui est souvent très peu considérée, a des points de vue qui sont d’une grande valeur.
Pour les séries, nous avons un jury de spectateurs, mais pas un jury qui approuve ou désapprouve collectivement les œuvres : par le biais d’un appel à candidatures, nous choisissons des cinéphiles qui voient toutes les séries dans le théâtre et en discutent comme le ferait un jury professionnel.
Enfin, pour la compétition immersive et la compétition de convergence, nous recherchons des créateurs XR issus de différents domaines. C’est donc la diversité qui guide notre choix.
En fait, au cœur de notre festival, il y a vraiment le désir de créer une connexion, de créer une plateforme où tous les professionnels de l’audiovisuel peuvent se rencontrer. J’ai l’impression qu’aujourd’hui le monde des séries ne parle pas au monde du cinéma, qui lui-même n’est pas très en phase avec le monde de l’immersif. Il y a tout un schisme, surtout au niveau des générations. Pourtant, je pense qu’un critique avec 40 ans d’expérience a beaucoup à donner mais aussi à recevoir d’une personne travaillant dans les nouvelles technologies ou d’un étudiant. Nous devrions échanger notre expertise beaucoup plus souvent !
C’est précisément la raison pour laquelle nous avons tant de Q&A au GIFF et que nous sommes généralement très attentifs à la relation entre les créateurs et le public.
Pour faire progresser la culture de l’audiovisuel, il faut aller plus loin, développer un concours qui mette en commun les différences et où la comparaison ne se fasse pas sur le type de technologie utilisée mais sur la qualité de l’œuvre mesurée dans sa capacité à exprimer au mieux des visions spécifiques de l’avenir.
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A la découverte du Geneva Digital Market
A. E. – Le Geneva Digital Market est aussi fondamental dans notre approche, car c’est vraiment le cœur battant de notre festival, parce qu’il nous permet de créer une plateforme dans laquelle nous pouvons aborder tous les défis majeurs de l’audiovisuel contemporain.
Chaque année, nous invitons des personnalités qui travaillent dans le domaine de l’audiovisuel – pas nécessairement dans les nouvelles technologies – pour ouvrir avec eux des discussions intéressantes sur les questions les plus importantes et pour discuter de la direction à prendre dans l’audiovisuel.
Cette année, nous avons, entre autres, une conférence sur le Marchine Learning qui confrontera des figures très différentes : Cristóbal Valenzuela, cofondateur et PDG de Runway, Nora Nahid Khan, écrivain, éditrice et commissaire de la Biennale de L’Image en Mouvement, 2024, Douglas Edric Stanley, qui appartient au monde académique et avec qui nous aurons une discussion plus orientée vers l’éthique des nouvelles technologies, et Simon Senn, artiste suisse.
Outre ces débats, le marché souhaite également offrir des opportunités concrètes aux artistes. Pour ce faire, nous organisons deux sessions de coproduction, l’une au niveau européen – les XR Co-production Market, pour la coproduction de projets XR en cours de développement – et l’autre dédiée aux artistes suisses, qui a un champ d’application un peu plus large en matière de création numérique. Il s’agit des Swiss Interactive Session, au cours de laquelle nous mettons en contact des artistes dont les œuvres sont achevées avec des conservateurs internationaux, issus du monde des musées, d’autres festivals, d’institutions de promotion internationale ou de fonds cinématographiques. Ces deux jours sont consacrés non pas à l’industrie au sens large, mais à la promotion des œuvres et au soutien des artistes individuels.
En soi, notre marché est petit, avec 15 œuvres internationales participantes et 10 pour la Suisse, mais c’est déjà la septième année que nous l’organisons et nous voulons aborder la question d’un espace numérique qui n’est pas encore structuré de manière claire et égale dans tous les pays. Nous devons vraiment aider les artistes à développer et à distribuer leurs œuvres d’art.
Les défis de la création immersive d’aujourd’hui
A. E. – C’est une question que l’ensemble de l’industrie immersive devrait aborder : nous avons de nombreuses réunions par an pendant les marchés ou les grands festivals où nous traitons de la nécessité de structurer la distribution des œuvres et nous discutons de la manière d’entrer en contact avec notre public, en particulier en ce qui concerne le secteur artistique. Après tout, le secteur immersif plus commercial et le secteur éducatif ont trouvé leur voie, mais le secteur plus artistique a encore besoin de perspectives.
Ce dont je peux parler avec le plus d’assurance, c’est des défis que je reconnais dans notre festival : pour mon équipe, l’un des plus importants, en particulier en tant que sélectionneurs, est d’avoir une vision géographique aussi large que possible. Nous avons accès à des œuvres provenant de différents pays, mais nous devons rechercher une diversité géographique de plus en plus grande. C’est l’un de nos objectifs pour l’avenir : découvrir de nouveaux territoires.
(Avec le Geneva Digital Market) nous voulons nous attaquer au problème d’un espace numérique qui n’est pas encore structuré de manière claire et égale dans tous les pays. Nous devons vraiment aider les artistes à développer et à distribuer leurs œuvres d’art.
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L’autre question que nous ressentons le besoin d’aborder est celle de l’installation des œuvres, qui nécessite de plus en plus de ressources. Nous voulons vraiment soutenir l’idée que les œuvres que nous sélectionnons dans notre festival peuvent être installées conformément à la vision des auteurs.
Bien sûr, ce n’est pas toujours facile : nous devons fournir des espaces appropriés et discuter très attentivement avec les différentes équipes qui sont derrière le développement de l’œuvre. Mais c’est un effort très important que nous voulons faire et c’est précisément la raison pour laquelle nous montrons de plus en plus d’installations au GIFF.
Nous sommes évidemment fascinés par tous les autres formats, et pas seulement par les installations : films à 360°, cinéma VR… Nous voulons offrir différentes possibilités d’accès au public.
Visiter le GIFF : les Territoires Virtuels
A. E. – Nous avons des projets spéciaux auxquels on peut accéder avec un billet. The Eye and I de Jean-Michelle Jarre et Hsin-Chien Huang, In Pursuit of Repetitive Beats de Darren Emerson, et Wallace & Gromit in The Grand Getaway de Bram Ttwheam et Finbar Hawkins. Ils ont tous une certaine longueur et c’est pourquoi nous leur avons donné leur propre espace.
Les autres propositions font partie d’une grande exposition qui comprend également des installations. Pour visiter cette exposition, nous disposons de quatre chemins virtuels : les Territoires Virtuels I, II, III et IV. Tulpamancer de Marc Da Costa et Matthew Niederhauser fait partie des Territoires Virtuels I et nécessite un accès payant.
Les trois autres parcours nécessitent également un billet qui donne accès à un groupe d’œuvres spécifique : les parcours ont été conçus de manière équilibrée, de sorte qu’il y a toujours une ou deux grandes installations, différents thèmes sont abordés, différentes sensibilités artistiques sont présentes (Territoires Virtuels II, Territoires Virtuels III, Territoires Virtuels IV).
Avec un ticket, vous pouvez accéder à ces espaces pendant 2 heures et demie, calculées pour permettre à l’utilisateur de voir l’ensemble, mais aussi de faire des pauses entre les œuvres. En outre, il y a toujours un membre du personnel par œuvre qui aide à l’accueil et explique au public comment se déroulera l’expérience, en répondant à ses questions.
La production immersive entre la perception du public et les politiques de soutien
A. E. – C’est dans la section immersive que nous avons connu la plus grande progression du public. Ils sont de plus en plus nombreux à venir chaque année. Je pense que les gens apprennent à laisser de côté leurs craintes technologiques, la peur du casque, et la relation avec les œuvres d’art devient plus facile. Au fil des ans, le GIFF devient un événement plus fluide à cet égard.
Cependant, si nous comparons la Suisse à la France, je dois dire que nous sommes en retard ici en termes de politique publique. Il y a peu d’événements et peu d’espaces pour expérimenter ces technologies, en particulier celles qui s’adressent à un public jeune.
Mais si je vous en parle, c’est parce que j’en suis très fier : nous avons récemment acheté une caravane de 25 mètres carrés, climatisée et chauffée pour l’hiver, nous en avons fait un lieu d’expérience de la VR, et maintenant nous nous apprêtons à parcourir les rues de Suisse pour proposer cette technologie à tout le monde… dans les écoles, sur les places publiques, aux personnes âgées à leur domicile !
Pour en revenir à la politique, je pense que l’une des difficultés réside dans le fait que, dans l’esprit des gens, l’immersivité est quelque chose qu’ils associent automatiquement aux jeux vidéo et aux films. Les gens ont du mal à l’encadrer ; c’est trop compliqué de le mettre “dans une boîte”.
Mais aujourd’hui, il y a vraiment une volonté dans notre pays d’avancer aussi sur le plan politique. Le Pôle de création numérique vise à créer un écosystème plus durable et plus vertueux pour la création numérique, et le GIFF en fait partie. Il y aura des financements pour la production d’œuvres mais aussi diverses initiatives seront activées pour renforcer la structuration de l’industrie. Une démarche très positive ! J’espère que ce hub pourra montrer à quel point il est important pour nous d’aller de l’avant.
Cependant, le lien avec le public reste quelque chose d’extrêmement important pour moi : il est nécessaire d’offrir au spectateur quelque chose de différent de la proposition ultra-commerciale des GAFAM, qui en elle-même ne suffit pas à démocratiser l’immersif. Nous devons montrer que la production indépendante et locale est également brillante, passionnante et facile d’accès.
Sur le processus de démocratisation du champ immersif
A. E. – Je ne peux qu’espérer que nous sommes au début de ce processus de démocratisation. Il y a un potentiel de développement. Nous avons évidemment besoin d’une politique au niveau européen pour la circulation des œuvres, c’est une question qui doit être résolue au niveau local, national mais aussi, en fait, européen. Je pense également que le développement technologique aidera le public : il sera possible d’avoir accès au matériel de manière moins onéreuse et plus facile. Tout cela sera certainement utile.
Et n’oublions pas le rôle des festivals. Ce sont des lieux essentiels ! Mais il est certain qu’un développement structurel de l’industrie est nécessaire et je pense qu’il y aura de grands changements dans un avenir proche. La distribution est essentielle et un certain nombre d’entreprises ont émergé pour s’en occuper. Nous verrons comment cela aidera le public à mieux accéder à l’immersivité.
Le lien avec le public est extrêmement important pour moi : il est nécessaire d’offrir au spectateur quelque chose de différent de la proposition ultra-commerciale des GAFA, qui ne suffit pas à démocratiser l’immersion. Nous devons montrer que la production indépendante et locale est également brillante, passionnante et facile d’accès.
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Un aperçu de la composition du programme (sans spoilers)
A. E. – Nous avons eu beaucoup de chance cette année parce que nous avons vraiment une grande diversité d’œuvres dans la programmation qui représente la variété de la création immersive aujourd’hui.
Une personne qui vient au GIFF peut voir de grandes installations d’artistes connus comme Jean-Michelle Jarre ou Darren Emerson et des œuvres de studios qui sont en pole position dans le monde immersif comme Atlas V. Elle peut aussi apprécier des œuvres différentes mais tout aussi intéressantes comme Consensus Gentium,, que je trouve absolument génial et qu’il faut essayer à tout prix : une œuvre de perspective, qui tire la sonnette d’alarme sur la société de contrôle.
Ensuite, il y a des œuvres qui s’intéressent à l’intelligence artificielle, comme Tulpamancer, et qui le font de manière à faciliter la discussion avec les gens et à les aider à comprendre comment cette technologie peut être utilisée dans le domaine artistique. Nous avons également des expériences de réalité mixte et de réalité augmentée, telles que Them. Us. Me, qui est une œuvre suisse créée par Laurent Rime et Léo Thiémard.
Il y a aussi plus de réalité virtuelle classique – bien qu’il soit injuste d’utiliser le terme “classique” pour décrire la réalité virtuelle, qui est toujours très innovante. Enfin, nous avons aussi plus d’installations artistiques, des expériences plus numériques qu’immersives.
En termes de sujets, un thème très fort que nous abordons également au Geneva Digital Market est celui du témoignage. Nous avons plusieurs œuvres qui présentent des témoignages de personnes sur des expériences liées à des guerres ou à des zones de conflit, telles que Murals, Fresh Memories: The Look, Remember This Place: 31°20’46”N 34°46’46”E, Draw for Change: Existimos, Resistimos, une œuvre qui s’intéresse au sort des femmes dans la société mexicaine. Il est intéressant de voir comment ces technologies sont utilisées pour recueillir et partager des témoignages sur des situations conflictuelles et des émotions intenses.
On y trouve également The Fury de Shirin Neshat, une autre œuvre forte liée à ce thème. Je dirais donc qu’il s’agit du premier thème. L’autre thème qui reste important est celui, déjà mentionné, de l’IA en tant que sujet de réflexion, parfois de craintes, de critique éthique, mais qu’il est tout à fait juste d’utiliser.
Nous avons également une œuvre très éducative comme Eternal Walkers, qui transporte le spectateur dans une peinture classique du XVIIIe siècle, The Nineteen Taoist Immortals de Kim Hong-do, et c’est une expérience merveilleuse. Dans le domaine de l’histoire de l’art, vous trouverez également Archi VR: The Villa Savoye, qui porte sur l’architecture et qui est une œuvre très importante.
Le GIFF ouvrira ses portes le 3 novembre. Vous pouvez acheter des billets pour les œuvres dans la section immersive sur la page dédiée du site web. Pour ceux qui sont curieux d’en savoir plus sur la programmation, consultez les articles publiés jusqu’à présent sur XRMust :
FINALMENTE EU (FINALLY ME) by Marcio Sal
IN PURSUIT OF REPETITIVE BEATS by Darren Emerson
TULPAMANCER by Marc Da Costa, Matthew Niederhauser
WALLACE & GROMIT: THE GRAND GETAWAY by Bram Ttwheam, Finbar Hawkins
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