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XR Magazine (FR)

Interview

« Comme une métaphore de la manière dont la bienveillance peut guérir la société » – Melodie Mousset (EMPATHY CREATURES)

2025-11-17

Mathieu Gayet

Nous avons récemment eu l’occasion de renouer avec Melodie Mousset et de replonger dans EMPATHY CREATURES, une œuvre qui réfléchit à l’importance des soins dans le bien-être personnel et collectif, présentée pour la première fois à Venice Immersive 2025.

Au GIFF 2025, nous avons découvert une version plus avancée de l’œuvre, qui continuera à évoluer au fil du temps avec de nouveaux contenus et de nouvelles significations. Nous avons profité de l’occasion pour explorer avec elle l’idée profondément humaine et discrètement révolutionnaire qui sous-tend cette œuvre, et pour réfléchir à l’importance d’un élément souvent sous-estimé : la mignonnerie, et la façon dont elle façonne la perception humaine.

Dans un jardin luxuriant niché au cœur d’un immeuble d’affaires animé, un petit oiseau virtuel délicat vole. D’un rouge flamboyant, au bord de l’épuisement, il tourne en rond, ramasse des mégots de cigarettes et se cogne la tête contre les murs en béton… Pauvre créature, si sensible, si exposée. Il vit, respire et ressent sans peau, reflétant l’épuisement émotionnel qui l’entoure.
EMPATHY CREATURES est une installation immersive émotionnellement intelligente, à mi-chemin entre la fiction spéculative et la simulation poétique de la vie sauvage. Se déroulant en deux parties, les participants rencontrent un être alimenté par l’IA qui les perçoit, leur parle et les invite gentiment à ralentir, à écouter et à s’engager dans des rituels de soins conscients. À l’instar d’un Tamagotchi collectif, l’œuvre explore la co-régulation émotionnelle, la guérison collective et notre responsabilité partagée dans un monde fragile et interconnecté. Une créature virtuelle pourrait-elle nous aider à renouer avec ce qui fait notre humanité ?

EMPATHY CREATURES comme moyen d’apaiser l’anxiété et d’encourager la bienveillance

MELODIE MOUSSET – J’ai développé EMPATHY CREATURES lors d’une résidence au Mobiliar Lab for Analytics à Zurich. Les chercheurs de cet institut analysaient le stress au travail à l’aide de modèles d’IA. Ils ont suivi la façon dont les gens tapaient sur leur clavier et déplaçaient leur souris d’ordinateur, et ces comportements subtils sont devenus des points de données. À partir de ces modèles, ils ont entraîné un algorithme à détecter les niveaux de stress.

Leurs conclusions étaient alarmantes : plus d’un tiers de la population suisse souffrait déjà de stress chronique ou était sur le point d’en souffrir. Et le stress chronique n’est pas seulement un mot à la mode : il conduit à l’épuisement professionnel, détériore l’organisme et peut contribuer à l’apparition de maladies graves telles que le cancer. Ce n’est pas une métaphore. C’est physiologique, psychologique, existentiel.

Bien sûr, leurs recherches se concentraient sur les environnements de bureau. Mais ce type de travail correspond exactement à ce que font la plupart des gens aujourd’hui. Je me suis donc dit : et si je créais une œuvre qui ne se contentait pas d’aborder ce sujet, mais qui tentait d’inverser le processus ? Pourrions-nous utiliser le même type de technologie pour contrer ce qu’ils révèlent ? C’est là que l’idée a germé.

Je me trouvais donc dans ce laboratoire, où je faisais mon stage, et l’idée m’est venue d’un seul coup, comme un tout. J’ai commencé à discuter avec les scientifiques et j’ai dit avec désinvolture : « Vous devriez créer quelque chose comme ça, peut-être une créature, comme un Tamagotchi collectif ». Je leur ai présenté le concept dans son ensemble et ils l’ont adoré. Ils m’ont encouragé à le réaliser moi-même. Au début, j’ai hésité. C’était une excellente idée, mais je ne me sentais pas concerné. C’était mignon et tellement différent de ce que je crée habituellement. Je n’étais pas sûr d’être la personne idéale pour ce projet.

EMPATHY CREATURES by Mélodie Mousset

Mais ensuite, j’ai compris : on a les idées pour lesquelles on est prêt, et les idées viennent à un moment précis de notre vie. Et j’étais à un moment où je m’occupais d’une personne très vulnérable, mon enfant, et où j’apprenais chaque jour ce que signifie prendre soin de quelqu’un et ce que cela fait à l’intérieur de soi. Ce que cela transforme en soi.

Tout à coup, tout est devenu clair. L’œuvre est devenue autobiographique. Je devais la réaliser. Elle n’était pas destinée à quelqu’un d’autre. Elle venait de là où j’étais, à ce moment précis. C’est là qu’EMPATHY CREATURES a vu le jour.

La réalité virtuelle entre magie sympathique et résistance douce

M. M. – La mignonnerie dans EMPATHY CREATURES est un choix esthétique, mais aussi stratégique. Je m’en suis rendu compte lorsque j’ai présenté mon travail à Venise. J’ai vraiment mis l’accent sur la mignonnerie. Je me suis inspiré de mon fils pour créer l’oiseau : ses expressions, ses grands yeux. J’ai un peu anthropomorphisé les traits de l’oiseau, car mon intention était fondée sur des recherches qui montrent que lorsque nous sommes confrontés à quelque chose de mignon, nous sommes irrésistiblement poussés à nous en occuper. Cela contourne les filtres rationnels et va directement au plus profond de notre cerveau.

Alors oui, je l’ai rendu super mignon pour manipuler tout le monde (rires). Mais c’est une stratégie politique intelligente. En fait, toute l’œuvre tourne autour de la gentillesse et de l’attention.

En effet, lorsque vous prenez soin de l’oiseau, vous prenez en réalité soin de vous-même. J’ai conçu toutes les interactions afin de vous connecter à votre propre corps, que ce soit pour ralentir mécaniquement votre rythme cardiaque grâce à la respiration ou pour vous faire souffler sur un pissenlit et sentir votre souffle sur votre main. Il s’agit d’un retour haptique, un lien direct avec votre propre présence, avec le monde, avec le thème. Ce type d’interactions n’existait pas, j’ai dû les inventer. J’ai en fait passé beaucoup de temps à imaginer des moyens de « piéger » les gens pour qu’ils s’adonnent à des pratiques de bien-être, mais en se concentrant sur l’oiseau plutôt que sur eux-mêmes. C’est, en quelque sorte, une forme de magie sympathique.

C’est exactement ce que j’aime dans la réalité virtuelle. Elle crée des illusions très tangibles, car votre corps est impliqué. Vous bougez, vous recevez des réactions, et dans EMPATHY CREATURES, l’oiseau réagit à vos actions. Cette boucle de rétroaction rend l’expérience très réaliste. C’est là que naît le lien émotionnel : dans ces micro-interactions.

L’un des meilleurs exemples est le moment où vous faites une bulle avec votre doigt. Vous soufflez littéralement de l’air sur votre main virtuelle. Vous sentez ce souffle sur votre peau réelle. C’est ce qu’on appelle le biofeedback. Votre corps l’enregistre, et soudain, une bulle géante et magnifique se forme au bout de votre doigt en réalité virtuelle. Ce simple geste relie votre souffle, votre corps et l’environnement virtuel de manière très directe. C’est un moment fort d’incarnation, qui vous donne un sentiment très puissant d’être présent dans la scène.

Then, through cuteness, through “oh, I want to help this little bird”, you escape the building. You’re no longer just an employee. By letting this small, vulnerable creature guide you, by taking care of it and playing with it, you begin to find joy and reconnect with your inner-child curiosity and spontaneity. And it’s through those small gestures that you gradually find a new form of freedom. It’s the breach in the machine, the point of dissidence. 

De cette manière, EMPATHY CREATURES devient une métaphore de la façon dont l’attention peut guérir la société. C’est simple, c’est poétique, mais c’est aussi politique. Une rébellion enracinée dans la poésie de l’attention. C’était mon idée de départ : utiliser la technologie pour perturber le système du travail, du stress et de la pression chronique, et créer une expérience de résistance douce.

De Venise au GIFF : instaurer la confiance, petit à petit

M. M. – Je pense avoir réalisé, à Venise, que le développement de l’œuvre n’était pas encore assez avancé. Les gens ne comprenaient pas vraiment pourquoi l’oiseau était stressé, car cette partie du récit n’était pas encore pleinement exprimée. Le concept était là, mais il n’était pas clairement communiqué.

L’idée centrale est que vous êtes entouré de ces immeubles imposants qui bloquent toute votre perspective, votre horizon : c’est presque comme être à l’intérieur d’une cage, d’une prison… plus précisément, d’une prison professionnelle. En tant que participant, vous incarnez l’un des employés de cet environnement. C’est un lieu oppressant, essentiellement une machine conçue pour organiser les corps et le temps.

EMPATHY CREATURES by Mélodie Mousset @ Venice Immersive 2025

Dans la version de Venise, la majeure partie de ce récit était absente, sauf peut-être dans l’architecture elle-même. Après Venise, j’ai donc commencé à me concentrer sur la création d’un nouveau début, une intro sans texte, sans voix off. Je voulais simplement que tout soit transmis visuellement, soniquement et à travers votre interaction avec l’oiseau.

EMPATHY CREATURES commence désormais par vous, debout au-dessus du jardin. L’oiseau apparaît et commence à manger un morceau de votre sandwich posé par terre près de vos pieds. Vous remarquez alors que vous tenez le sandwich dans votre main et que vous pouvez lui en donner davantage. C’est alors que cela se produit : une vague de stress émerge du bâtiment.

Le stress prend la forme d’une substance rouge toxique, très viscérale et envahissante. Elle est composée de bruits de machines, de claviers, de ventilation, de froissements de papier — tous ces signaux sonores anxiogènes de la vie au bureau. L’atmosphère devient de plus en plus tendue. L’oiseau devient rouge vif, submergé par cette atmosphère, puis soudainement très effrayé. Il s’envole et se cache dans son arbre.

À ce moment-là, vous êtes téléporté dans le jardin, et votre tâche consiste à renouer avec lui, à rétablir la confiance. Petit à petit, il commence à sortir de sa cachette et à vous faire à nouveau confiance.

J’ai également modifié la structure du menu de la version précédente, dans laquelle il suffisait de choisir une action dans une liste. Désormais, tout se déroule de manière continue dans le jardin. Une fois que l’oiseau a quitté son arbre, vous pouvez le nourrir un peu, et il vous fait progressivement davantage confiance. Cela ouvre la voie à d’autres expériences. Son bonheur et son état émotionnel évoluent tout au long du jeu.

Cette nouvelle version vous donne beaucoup plus de temps pour interagir de manière significative avec l’oiseau. Vous avez l’impression que votre présence compte vraiment, que vous avez un impact réel. Ce n’est plus une simple collection de mini-jeux. Vous vous déplacez dans le jardin, et chaque chemin mène à une expérience différente. L’oiseau vous guide d’une expérience à l’autre. Le déroulement du jeu est désormais beaucoup plus fluide.

EMPATHY CREATURES @ CTRL+ALT+RELAX, The Mobilière Cooperative’s Art Collection
EMPATHY CREATURES @ CTRL+ALT+RELAX, The Mobilière Cooperative’s Art Collection

Un Tamagochi collectif

M. M. – J’aime appeler cette expérience un Tamagotchi collectif. L’oiseau est piloté par une IA, à la fois dans le casque VR et sur le PC, mais ce qui n’était pas évident pour tout le monde, c’est la façon dont le projet s’est développé en deux parties parallèles.

D’un côté, il y a l’expérience VR : vous interagissez directement avec l’oiseau, de manière intime et personnelle. De l’autre côté, il y a ce qui se passe sur le grand écran en dehors de l’expérience. Cette partie montre l’oiseau dans son environnement, en dehors de l’interaction avec l’utilisateur. Il est toujours piloté par l’IA, mais au lieu de réagir aux personnes, l’oiseau réagit à son environnement.

Il a des besoins fondamentaux comme se réveiller, manger, se laver, voler et chercher de la nourriture, et il suit une sorte de routine quotidienne, entièrement selon ses propres conditions. C’est presque comme un documentaire virtuel sur la nature, avec une caméra en temps réel qui suit l’oiseau dans son univers.

Ce qui est intéressant, c’est que même si rien de « mauvais » ne se produit activement dans cet environnement, l’oiseau réagit tout de même à la pression invisible du stress et de la toxicité humains. Il la ressent et, avec le temps, cela le conduit à un état d’épuisement.

Mais c’est là qu’intervient l’idée de collectivité. Lorsque les gens entrent dans l’expérience de réalité virtuelle et s’occupent de l’oiseau avec bienveillance, ce qui leur permet de se sentir mieux eux-mêmes, cette attention a un effet positif sur le bien-être de l’oiseau dans le monde parallèle. Son état s’améliore. Son environnement change.

Cette connexion n’était pas encore pleinement mise en œuvre à Venise, mais elle constitue un élément clé de l’évolution de l’œuvre. Le bien-être de l’oiseau, et même la santé du jardin, s’amélioreront à mesure que davantage de personnes participeront et s’en occuperont. Plus les gens s’impliqueront, plus l’ensemble du système deviendra solide. Il ne s’agira donc plus seulement d’une interaction individuelle : cela deviendra quelque chose de persistant, de partagé et de continu. L’aide de tous sera nécessaire.

EMPATHY CREATURES by Mélodie Mousset

Bon nombre de ces développements sont prévus pour la prochaine phase de production, pour laquelle je suis actuellement en train de lever des fonds. Le travail est encore en cours.

Dans la prochaine version, cet impact partagé sera encore plus visible. Par exemple, l’oiseau rencontre parfois des mégots de cigarettes ou des tasses à café éparpillés dans le jardin, ce qui le contrarie. Dans les versions futures, les utilisateurs pourront nettoyer l’espace, et ces gestes laisseront une trace durable. Chaque action contribuera à l’environnement. Tout sera relié à cet environnement partagé.

L’oiseau ne vous appartient donc pas uniquement. Il appartient à la communauté. Et le jardin reflète ce que la communauté fait… ou ne fait pas.

Mécanismes d’intelligence artificielle dans l’interaction avec l’oiseau

M. M. – La partie IA d’EMPATHY CREATURES est développée par une société française appelée Virtual Beings. Elle a mis au point un moteur comportemental qui anime les émotions et les mouvements en temps réel, en particulier pour les oiseaux, domaine dans lequel elle se spécialise depuis de nombreuses années.

Il ne s’agit donc pas d’une animation traditionnelle, où vous devez construire toute l’histoire à l’avance et où le personnage suit un cheminement fixe. Même dans des configurations animées plus élaborées, vous pouvez prédefini quelques choix de ramification. Mais ici, c’est complètement différent. L’oiseau dans EMPATHY CREATURES est un personnage sensible, ce qui signifie qu’il réagit en temps réel à l’utilisateur et à l’environnement. Et il est imprévisible. Vous ne pouvez pas anticiper entièrement ce qu’il va faire.

Par exemple, si vous le caressez, il apprécie peut-être cela. Mais si la caresse est trop forte ou trop insistante, il peut commencer à vous regarder différemment. Il peut s’éloigner. Ses vocalisations se produisent également en temps réel : les gazouillis sont synthétisés sur place, s’adaptant à son état émotionnel et au contexte. Ainsi, tout — son humeur, ses décisions, ses réactions — est généré de manière dynamique.

Lorsque j’ai dû réorganiser l’expérience pour le GIFF, le système d’IA m’a offert une réelle flexibilité. Au lieu de revenir en arrière pour développer une nouvelle animation afin de l’adapter à la nouvelle structure, j’ai simplement pu dire au système : « Maintenant, l’oiseau doit venir à la rencontre de l’utilisateur au début. » À partir de là, il décide où se percher, s’il doit vous regarder, combien de pain manger. Il a son propre sens de la présence.

Ce que j’aime, c’est que j’ai l’impression que l’oiseau et moi co-dirigeons l’expérience. Je crée la structure et l’environnement, mais l’oiseau a une réelle liberté d’action. Je ne peux pas le contrôler entièrement. Cela signifie que chaque utilisateur vit une expérience légèrement différente. Le parcours est le même, mais le timing, les réactions et la texture émotionnelle changent à chaque rencontre.

Par exemple, un de mes amis est accidentellement tombé sur l’oiseau alors que celui-ci commençait à se détendre et à renouer le contact. Il est devenu rouge vif sous l’effet de la panique et s’est envolé à nouveau. Mon ami a dû regagner sa confiance à partir de zéro. Cela n’était pas prévu dans le scénario. Mais cela peut arriver, car la technologie donne à l’oiseau son propre sens des besoins et des réactions.

EMPATHY CREATURES by Mélodie Mousset

Je ne suis pas un expert en matière de fonctionnement du moteur, car celui-ci est assez complexe, mais je sais que tout bouge chez l’oiseau : les yeux, la queue, les ailes. Des milliers de micro-animations sont superposées et déclenchées en temps réel. Ses expressions et ses gestes sont toujours uniques, à chaque instant.

C’est ce qui rend l’oiseau si vivant par rapport aux personnages VR standard. Il réagit à votre présence. Il écoute votre voix. Si vous parlez, il entend, analyse et répond, parfois en reproduisant votre ton dans le langage des oiseaux, parfois en le modifiant légèrement. Cette reproduction vocale vous invite à vous synchroniser émotionnellement avec lui.

C’est une technologie très puissante, qui crée un lien très réel.

Une différence entre les sexes dans la réponse émotionnelle aux EMPATHY CREATURES

M. M. -J’ai remarqué quelque chose pendant la présentation à Venise, quelque chose qui m’a surpris. D’une manière générale, les hommes ne semblaient pas apprécier l’expérience. La différence d’engagement entre les hommes et les femmes était très nette, et honnêtement, cela m’a donné matière à réflexion.

Il y avait une sorte de résistance, voire une certaine arrogance dans la façon dont beaucoup d’hommes abordaient l’œuvre et l’oiseau. Ils ne voulaient pas interagir avec l’oiseau, ne se permettaient pas de s’engager émotionnellement. C’était étrange et assez frappant par rapport à la réaction des femmes.

D’autres personnes étaient plus ouvertes. Elles se laissaient toucher, guider par cette petite créature vulnérable. Elles n’essayaient pas de contrôler l’expérience, elles la laissaient se dérouler. En revanche, beaucoup des hommes que j’ai observés semblaient se concentrer uniquement sur l’accomplissement de la tâche, s’assurant d’arriver correctement au bout. Cette différence m’a marquée et j’aimerais maintenant mener des recherches approfondies à ce sujet. Car ce que j’ai vu à Venise était trop évident pour être ignoré. Et d’une certaine manière, j’ai eu le sentiment que ceux qui avaient le plus besoin de ce genre d’expérience étaient justement ceux qui la rejetaient.

Je ne sais pas si c’est parce qu’il est mignon ou parce qu’il est petit et a besoin d’attention, ce qui peut être difficile à gérer émotionnellement ou inhabituel. Mais au fond, cette œuvre traite du lien émotionnel. Et nous savons que beaucoup d’hommes ont du mal à s’ouvrir émotionnellement, car la société leur apprend souvent à réprimer leurs sentiments.

EMPATHY CREATURES by Mélodie Mousset

C’est pourquoi je souhaite approfondir cette question. Parce que la mignonnerie agit au niveau neurologique. Elle s’adresse directement à la partie du cerveau qui déclenche l’attention, et je ne pense pas que seules les femmes y soient sensibles. Je pense que c’est universel. Mais je souhaite vérifier cela de manière rigoureuse. Je souhaite présenter mes observations et mes hypothèses à des chercheurs, à des personnes qui étudient ce sujet, et voir si mon travail peut nous aider à mieux nous comprendre tous.

Si je pouvais trouver un moyen de rendre cette expérience plus accessible aux hommes, pour les aider à s’ouvrir un peu plus, j’aurais l’impression d’avoir accompli quelque chose d’important. Ce serait comme remporter une petite bataille, mais une bataille significative.

La réalité virtuelle comme terrain de jeu créatif

M. M. – On me demande parfois si cela me semble étrange, en tant qu’artiste, de créer une expérience qui, au final, ne m’appartient plus vraiment. Quelque chose que d’autres s’approprient, façonnent et vivent d’une manière que je ne peux pas prévoir. Mais c’est en fait ce que j’aime dans l’art, et dans la réalité virtuelle en particulier : en tant qu’auteur, je peux lâcher prise et laisser quelqu’un d’autre « s’approprier » l’histoire. Laisser l’expérience prendre son envol toute seule. Et avec EMPATHY CREATURES, cela devient encore plus évident : je n’ai aucune idée de ce que sera votre expérience, ni de celle des autres. Chaque personne qui entre dans EMPATHY CREATURES peut vivre quelque chose de complètement différent. Je pourrais passer des heures à regarder les gens vivre cette expérience, à découvrir comment ils interagissent, quels moments inattendus surgissent. Je suis sûr que je serais témoin de choses que je ne savais même pas possibles dans cette œuvre. Et je trouve cela vraiment passionnant.

Cela a toujours été mon approche de la réalité virtuelle, même avant que je commence à utiliser l’IA. Toutes mes œuvres sont structurées comme des bacs à sable créatifs, des systèmes ouverts où les gens peuvent explorer, expérimenter et créer leur propre signification. Plus vous donnez, plus l’expérience vous le rend. C’est la partie que je ne peux pas contrôler, et c’est ce que j’aime dans tout cela.

Ma première œuvre en réalité virtuelle fonctionnait déjà ainsi. C’est devenu ma marque de fabrique au fil du temps. C’est la raison pour laquelle je travaille en réalité virtuelle, car je n’aime pas travailler autrement.

J’ai essayé une fois de réaliser un film narratif, une histoire très personnelle sur un voyage que j’avais fait, mais je n’ai pas réussi. Le processus de montage, qui consistait à choisir entre des milliers de versions possibles d’une même séquence, était un véritable cauchemar. Que faut-il inclure, que faut-il couper, que faut-il montrer en premier, quel texte faut-il superposer ? Je trouvais cela insupportable. Toutes ces décisions, tous ces choix à faire, me paralysaient.

C’est ce que j’aime dans la réalité virtuelle : je n’ai pas à choisir. C’est vous qui choisissez. Je mets en place le matériel, le contexte, mais ensuite, c’est votre histoire. Vous vous lancez et vous vous l’appropriez.

Parce que, honnêtement, je déteste choisir. Vraiment. Pour moi, c’est un cauchemar ! Un véritable cauchemar. (rires)

In this article


EMPATHY CREATURESVirtual Territories @ Geneva International Film Festival (GIFF) 2025

Publication:

novembre 17, 2025

Author:


Mathieu Gayet
XR Magazine (FR)

–

Interview

Une réponse

  1. ITW Serge Vuille (ENSEMBLE CONTRECHAMPS)
    21/11/2025

    […] « Comme une métaphore de la manière dont la bienveillance peut guérir la société » – Melodi… […]

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