Studio Geppetto est un studio de création français spécialisé dans l’animation et le motion design, à destination de projets narratifs en réalité virtuelle – mais pas que. Décryptage avec le fondateur du studio Amaury Campion, qui est présent à Venise Immersive cette année avec 2 projets ; EDDIE AND I de Maya Shekel (en tant que coproducteur) et LESS THAN 5 GR. OF SAFFRON de Négar Motevalymeidanshah (en tant que prestataire chargé de l’animation).
Cover: EDDIE AND I
Studio Geppetto a également sorti JACK & FLO fin 2024, un film d’animation VR qui a remporté cet été Meilleure expérience narrative en VR au Guanajuato International Film Festival 2025.
Studio Geppetto, une spécialité dans l’animation VR
Amaury Campion – J’ai une formation d’ingénieur en télécommunication, mais dès ma sortie d’études je suis devenu freelance en motion design. Cela me permettait d’accompagner mes anciens camarades d’école notamment, et donc rapidement je me suis constitué un réseau professionnel. Je savais faire des vidéos, et eux en avaient besoin ! Je suis arrivé au format immersif en même temps, par une discussion avec un ami, Clément Cerles, qui travaillait lui sur la spatialisation sonore pour des vidéos 360. J’ai réalisé un court métrage pour les aider à tester certaines fonctionnalités, et c’est SNOWBALL qui est accessible aujourd’hui gratuitement sur Youtube. Nous avons dû trouver la façon d’y ajouter du son spatialisé, ce que le player de Youtube ne gérait pas forcément à l’époque.
A. C. – C’est SNOWBALL qui m’a donné envie d’aller plus loin, et de tester le temps réel. Je venais de voir ALLUMETTE de Penrose Studios, et j’avais été bluffé par le résultat – même si c’était trop long pour moi. Pour un contenu immersif, je me suis demandé si on ne pouvait pas lier l’avancée de l’action au comportement du spectateur. Que l’action puisse se figer si le spectateur ne regarde pas directement, en quelque sorte. C’est avec ce constat que j’ai imaginé JACK & FLO en 2018 avec Clément, avec des boucles d’interactivité passives. Le film “attend” le spectateur, avance à son rythme sans perdre les personnages. Nous avons eu des premiers financements, réalisé un prototype en PCVR grâce à AnimVR pour vraiment peindre des assets et animer. Quill ne le permettait pas à l’époque.
Entre-temps, Antoine Cayrol et Arnaud Colinart (Atlas V) m’ont proposé de les accompagner sur GOODBYE MR. OCTOPUS sur Quill. Nous avons sortis assez rapidement le projet, et en 2022 je suis retourné sur JACK & FLO en produisant un nouveau prototype sur Quill pour Quest. Nous avons eu l’aide du CNC en production, et ajoutant des financements personnels nous l’avons sortis fin 2024 à l’Immersive Tech Week.
Un studio ouvert à la coproduction internationale
Studio Geppetto est né d’une envie de travailler sur tous types de projets, pas que les miens. Le studio réunit différents talents, et peut intervenir en producteur, coproducteur ou simple prestataire pour de l’animation VR. Par ailleurs, nous continuons aussi une activité en motion design. En parallèle de tout cela, j’ai eu des propositions d’accompagner des projets qui avaient des besoins liés à Quill – logiciel apprécié par beaucoup, mais dont il faut maîtriser les contraintes. Sur LESS THAN 5 GR. OF SAFFRON (produit par TEN2TEN en France) par exemple, au-delà du film VR nous devions livrer un .apk du projet pour le mettre à disposition d’une diffusion en dehors du store Meta, ce que Quill ne fait pas.
J’essaie de pousser la poésie visuelle ; qu’il y ait un côté réconfortant visuellement. Et toujours avec un aspect un peu artisanal, malgré l’usage d’outils numérique, de production 3D. Chez Studio Geppetto, nous essayons dans notre démarche de toujours conserver un aspect très traditionnel de l’animation, du papier dessiné à la main, des coups de pinceaux…
Pour EDDIE & I j’ai rencontré Maya Shekel à NewImages 2023 et j’ai été séduit par le projet et la proposition d’utiliser la langue des signes. C’est même assez fou de penser qu’on a le hand tracking et qu’il n’y ait pas plus d’usage de cette idée ! Je leur ai montré le deuxième prototype de JACK & FLO, ce qui les a convaincu de la qualité que nous pouvions proposer – et de notre capacité à amener une esthétique qui correspondait au projet, très illustré. Studio Geppetto est sur EDDIE & I coproducteur.
Nous accompagnons aussi ROUSSEL’S MUSIC BOX de Niccolò Manzolini et Lucia Malerba, qui est en développement actuellement. Là-aussi, nous sommes coproducteurs et avons déjà réunis des financements en France. La musique originale est créée par Pierre Bastien.
L’animation, un potentiel important pour l’immersif
Nous avons développé tout un processus proche du stop-motion, en VR. Nous créons chaque asset, et ensuite nous pouvons le déplacer à volonté. Évidemment, c’est plus de liberté que le stop motion classique puisque nous pouvons aussi revenir en arrière. Nous avons la sensation de bouger les personnages, les squelettes, zoomer ou dézoomer à l’infini, améliorer les détails… Quand on animait avant sur Maya, c’était compliqué d’appréhender la 3D. J’anime désormais parfois directement en VR, ce qui me permet de mieux placer ma scène, en très peu de temps. Et en utilisant Blender aussi.
Il reste des limites au médium VR qui viennent des casques, et de ce qu’on peut proposer au spectateur. Néanmoins l’animation offre un champ de création infini ; tout peut être réalisé visuellement. Nous nous efforçons ensuite de proposer une solution graphique et narrative qui va convenir au matériel, et d’amener chaque composant du projet pour que cela soit possible de le diffuser (sans être trop lourd, etc.). En assumant une démarche où nous ne sommes pas dans du photoréalisme, cela permet d’explorer des styles et des environnements qui vont faciliter l’immersion dans l’histoire.
Les nouvelles tendances de l’animation VR vont vers des propositions plus assumées, parfois plus minimalistes, qui peuvent aussi aller vers des économies de moyen. On peut se focaliser sur les détails à apporter pour les éléments de l’histoire, ce qui doit bouger… C’est le cas notamment sur LESS THAN 5 GR. OF SAFFRON où Negar, la réalisatrice, a souhaité pousser l’aspect visuel et la mise en scène des scènes de cuisine qui appellent les traumas de l’héroïne.
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