L’un des derniers rendez-vous européens de l’année sera la 12e édition de Stereopsia (Europe – le salon ouvrant sa branche sud-américaine en 2021) du 15 au 16 décembre prochain. A l’occasion de ces deux journées de conférences et rencontres autour du médium immersif, nous anticipons (sans spoilers !) une conférence centrée autour des contenus immersifs à destination des institutions et du patrimoine. Un sujet d’actualité que nous avons souhaité discuter avec Deborah Papiernik, SVP New Business & Strategic Alliances à Ubisoft.
Le studio mondial, qui vient de sortir un nouveau volet d’Assassin’s Creed (Valhalla, sur les Vikings), a déjà développé plusieurs jeux en réalité virtuelle et différentes expériences immersives. Plus récemment Ubisoft a aussi mis son expertise au service de projets culturels, notamment lors de l’exposition Pompéi au Grand Palais, ou en proposant une modélisation virtuelle de Notre-Dame des plus fidèles.
Plus d’informations sur la conférence
Ubisoft et les nouvelles expériences immersives
Deborah Papiernik – Le département New Business a été créé voici 5 ans chez Ubisoft, regroupant deux initiatives : l’attraction VR Rabbids Ride avec les Lapins Crétins (lien), et une ambition de transformer Just Dance en spectacle live. Nous nous sommes rendu compte que nous pouvions mobiliser notre expertise dans le divertissement pour innover dans d’autres secteurs que le nôtre, et avec des partenaires. Les projets se font souvent au détour de rencontres avec d’autres sociétés, sur les salons, les festivals. La rencontre avec Iconem (société française spécialisée dans la virtualisation de lieux historiques) nous a ainsi permis de proposer une expérience VR inédite lors de l’exposition “Cités Millénaires : Voyage virtuel de Palmyre à Mossoul” à l’Institut du Monde Arabe en 2019.
D. P. – Mon département a sa propre petite équipe de développement, nous pouvons donc avancer rapidement sur un projet lorsqu’il nous intéresse. Nous repartons souvent d’assets graphiques provenant de jeux existants : Les Lapins Crétins, le modèle de Notre-Dame développé pour Assassin’s Creed Unity, etc. Il nous arrive aussi d’utiliser des modèles fournis par nos partenaires : modélisations 3D ou issues de photogrammétrie, comme avec Gédéon ou Iconem. Cette façon de procéder nous permet de produire rapidement, et souvent avec un niveau de qualité assez élevé. Notre expertise venant du jeu vidéo nous permet de créer des expériences immersives adaptées aux différents publics et qui sauront transmettre de l’émotion.
Produire pour le patrimoine : une suite logique
D. P. – Point de rencontre entre l’art, le divertissement et la technologie, le jeu vidéo a une place un peu transversale qui permet de “casser les silos” entre les différentes industries créatives et culturelles. Les gamers connaissent déjà bien nos univers et par notre proximité avec d’autres acteurs de la culture, comme les musées ou les producteurs de documentaires, nous pouvons mettre aujourd’hui des expériences immersives à la portée de publics élargis.
D. P. – Les jeux sont avant tous là pour divertir, mais du fait de leur composante sociale ou même de leur contenu, certains ont également une dimension éducative forte. Chez Ubisoft, nous avons une équipe de recherche, dont plusieurs historiens, qui travaillent avec des experts pour nourrir les équipes de développement des jeux et leur permettre de recréer des univers ou de revoir des imaginaires – tout en préservant l’intérêt du gameplay, quitte parfois à s’éloigner un peu de la réalité historique pour les besoins du jeux (modification de la géographie d’un lieu, de l’architecture d’un bâtiment, etc.). Assassin’s Creed est souvent décrit comme la porte d’entrée dans l’histoire pour des millions de joueurs dans le monde : nous leur donnons envie d’explorer l’histoire, libre à eux d’aller ensuite vers des ouvrages plus scientifiques pour trouver des informations plus complètes.
Amener la VR au plus large public à travers les institutions
D. P. – Sur la réalité virtuelle, il faut aller à la rencontre du public, notamment via des événements, des expositions. Si les premières prévisions sur le marché de la VR étaient très (trop) optimistes, nous restons confiants quant au potentiel des technologies de réalité virtuelle et nous sommes convaincus du rôle que peut jouer le LBE : Location-Based Entertainement / Experience. Le matériel se simplifie et devient plus accessible mais les lieux de divertissement ou de culture restent un bon moyen de découvrir ces technologies avant de s’équiper à la maison. Notre-Dame VR est déjà disponible gratuitement sur les stores VR et sera prochainement mise à disposition des visiteurs de la Crypte Archéologique de l’Ile de la Cité, au pied même de la cathédrale (dès que les conditions sanitaires le permettront). Ces démos se tiendront dans le cadre de l’exposition « Notre-Dame de Paris : de Victor Hugo à Eugène Viollet-Le-Duc », un lien temporel fort avec notre représentation du bâtiment avec sa flèche et ses gargouilles – un choix anachronique assumé de représentation du monument dans le jeu Assassin’s Creed Unity dont l’action se déroule pendant la Révolution Française.
D. P. – Nous avons aussi développé une expérience VR autour des univers de Méliès pour le nouveau musée de la Cinémathèque Française à Paris, qui doit ouvrir début 2021. Père fondateur du cinéma et des effets spéciaux, Georges Méliès n’aurait probablement pas hésité à explorer la VR s’il vivait à notre époque !
Privilégier la cohérence du public : LBE ou stores
D. P. – Plusieurs de nos expériences sont disponibles sur les stores, mais certaines ont plus leur place en location-based. Pour les escape games en VR (dans les univers d’Assassin’s Creed ou de Prince of Persia) il faut 4 joueurs avec un équipement VR high-end et une connexion solide pour jouer à la maison. Le marché VR ne nous semblant pas tout à fait prêt, nous avons privilégié une expérience location-based, en partenariat avec des salles d’Arcade VR ou d’escape game traditionnel, la VR pouvant venir compléter leur offre.
D. P. – A part l’expérience Notre-Dame VR que nous avons produite spontanément après l’incendie, nous privilégions des projets développés conjointement avec des partenaires ou des espaces de diffusion. Nous accompagnons aujourd’hui Little Big Story et France Télévisions sur le formidable projet transmedia Lady Sapiens : un documentaire pour la case Science Grand Format de France 5 sur le rôle de la femme dans la préhistoire illustré par des séquences filmées dans le jeu vidéo Far Cry Primal, un petit film animalier pour le Paléosite de Saint-Césaire en Charente-Maritime entièrement tournée dans le moteur du jeu, et une expérience VR tirant également partie des assets du jeu. Au-delà de la technologie et des expertises, nous proposons des contenus ; notre matière est riche et ouvre de nombreuses possibilités au-delà du jeu vidéo !
Pour en savoir plus +
https://stories.ubisoft.com/video/patrimoine-vr-monuments-guerre/
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