Reynard Films (basée à Leipzig, Allemagne) est un nom reconnu dans l’écosystème immersif, avec sa capacité à coproduire des œuvres narratives fortes et souvent engagées. Alors que trois de leurs projets sont présentés lors de l’édition 2025 de Venice Immersive, portrait d’une jeune société de production qui navigue aussi entre cinéma traditionnel (court et longs métrages) et innovation technologique. Entretien avec Katharina Weser, co-fondatrice et productrice.
- EDDIE & I, by Maya Shekel
- THE CLOUDS ARE TWO THOUSAND METERS UP, by Singing Chen
- THE SAD STORY OF THE LITTLE MOUSE WHO WANTED TO BECOME SOMEBODY, by Nicolas Bourniquel, Floriane Cortes
Reynard Films, une société de production à 360 degrés dès le départ
Katharina Weser – L’intention avec Reynard Films, que ce soit pour le cinéma ou la XR, a toujours été de mettre en priorité l’artistique, la qualité. En réalité, nos débuts dans la création immersive sont le fruit d’une rencontre : une conversation à la sortie de mes études avec Igal Kohen, un producteur français. Il m’a alors parlé d’un projet de web série portée par son frère Abel, avec un segment en réalité virtuelle. C’était BIOLUM, et ça a été une de nos premières productions… et coproduction par conséquent ! La web série n’a jamais été produite, mais le film VR si. BIOLUM a connu une très belle carrière en festivals, avec de nombreuses sélections et des prix prestigieux (notamment le prix du public au SXSW et le Future is Sensible Award du GIFF de Genève). C’est sur ce projet que j’ai tout appris, jusqu’à la découverte d’un moteur de temps réel !

K. W. – C’est à travers des premiers projets comme BIOLUM que j’ai vu tout l’intérêt de pouvoir produire différents formats, et de m’intéresser à l’innovation. Il y a des univers fascinants à explorer grâce aux nouvelles technologies. Chez Reynard Films, nous avons un regard très cinématographique, mais ceci n’exclut pas les nouvelles écritures. D’ailleurs cette année à Venise, nous aurons 3 œuvres immersives présentées mais aussi un long métrage coproduit avec le Liban, IT’S A SAD AND BEAUTIFUL WORLD de Cyril Aris, produit notamment par mon partenaire Georg Neubert. Dans tous nos projets, il y a la recherche d’un même travail sur la narration. Que ce soit un film traditionnel, ou une œuvre interactive. c’est le même intérêt qui se dégage de notre travail de production. Je pense que d’ici quelques années, les innovations de la XR auront été encore plus adoptées par le cinéma, les techniques se mélangeront.
Conserver une dimension cinématographique dans chaque projet
K. W. – Nos projets ont toujours une vraie force narrative – qu’il s’agit d’expériences XR, de films ou encore de jeux vidéo. C’est une dynamique importante pour nous de rester focaliser sur ce point. Et c’est aussi pour cela que nous avons créé Yaga Studio, qui peut nous accompagner sur la production de nos projets innovants tout en conservant ce lien avec le monde des histoires. Nos développeurs viennent parfois du monde du gaming, et nos échanges sont enrichis par nos différentes approches. A nous aussi de nous rapprocher d’une façon de pensée plus interactive, dynamique, qui peut nous amener là-aussi sur des créations vraiment originales, avec des caractères, des couleurs ou des univers que je n’ai jamais vus avant.
K. W. – C’est aussi pour nous l’occasion de défricher un terrain nouveau, en termes de création. Il faut tout inventer, créer des processus de production, mais pour un résultat unique ! Sur ce chemin, nous avons eu la chance de rencontrer d’autres producteurs, à l’international, et d’établir des collaborations sur la durée – notamment avec les français d’Atlas V et Astrea. Avoir un publisher à nos côtés est une vraie force, et un gain de temps considérable.
K. W. – Nous avons la chance de bénéficier aussi d’un système d’aides très bien établi en Allemagne, à la fois dans l’audiovisuel traditionnel et l’innovation (contenus immersifs, gaming). Nous avons ainsi la force de pouvoir avancer des 2 côtés, sans être limité à un seul médium. Les producteurs de cinéma sont aujourd’hui obligés de se diversifier, en produisant aussi des séries télévisées. Notre démarche est identique avec les nouveaux médias, ce qui continue de nous donner une forme d’indépendance. C’est comme cela que nous pouvons ouvrir de nouveaux horizons, avec des artistes pour leur première réalisation comme Marion Burger ou Ilan J. Cohen pour EMPEROR. Nous accompagnons aussi un réalisateur VR, Pedro Harres, sur son nouveau projet LALALABYRINTH. Nous accompagnons aussi une chercheuse en physique qui travaille sur un projet artistique. Nous pouvons ainsi accueillir des créateurs qui viennent d’horizons très différents, les accompagner sur de nouveaux chemins, construire des équipes spécifiques à chaque fois, avec des compétences précises..

De Leipzig à la scène internationale
K. W. – Et c’est aussi pour cette diversité, et cette originalité de chaque projet que nous développons beaucoup de coproductions internationales. THE SAD STORY OF THE LITTLE MOUSE WHO WANTED TO BECOME SOMEBODY de Nicolas Bourniquel et Floriane Cortes par exemple, c’est un long métrage d’animation en soi. Notre équipe (aujourd’hui, 15 personnes) à l’expertise de la création immersive, mais sait aussi faire de l’animation. Donc nous réunissons les talents. C’est aussi comme cela que nous sommes coproducteurs d’un projet comme 9 MILLION COLORS de Bára Anna, film d’animation “flat” qui a fait sa première Annecy cette année, et dont nous avons assuré l’animation dans Blender et Unity.
K. W. – A l’international, je travaille aujourd’hui avec les coproducteurs qui me proposent de beaux projets. Et cela peut venir de n’importe où : nous avons cette année à Venise des projets coproduits avec la France, Israel ou Taiwan ! THE CLOUDS ARE TWO THOUSAND METERS UP de Singing Chen, déja récompensée à Venice immersive avec THE MAN WHO COULDN’T LEAVE en 2022, qui nous a sollicité pour le volet animation de son projet. Nous avons travaillé avec elle sur des scènes utilisant le Gaussian Splatting, ce qui était pour le coup assez nouveau pour nous. Mais c’est ce côté innovant qui nous fait avancer.
EDDIE & I : c’est une très belle histoire sur le handicap, qui est une thématique assez peu abordée au sein des projets interactifs. J’ai rencontré la réalisatrice et productrice israélienne Maya Shekel (Moosh Studio) par Max Permantier du FilmFernsehFonds Bayern. Maya savait exactement ce qu’elle voulait, et nous avons pu lui apporter notre expérience sur l’animation et le code.
THE SAD STORY OF THE LITTLE MOUSE WHO WANTED TO BECOME SOMEBODY, by Nicolas Bourniquel, Floriane Cortes : c’est le producteur Antoine Cayrol qui nous a approché au moment où nous faisions BIOLUM, avec une vraie intention de faire un film VR. Une vraie ambition de cinéma, qui a dû évoluer pendant sa phase de développement dans un marché qui a depuis fortement évolué. Ceci nous a amené à trouver un troisième coproducteur en Belgique, THE PACK studio, pour nous accompagner. Finalement, c’est en Allemagne que nous avons réalisé la plus grosse partie du travail – En France, avec le suivi de production et certains postes (comme le réalisateur), ont été réalisés la musique et le prototype.
THE CLOUDS ARE TWO THOUSAND METERS UP de Singing Chen : un magnifique projet en cours de finalisation, à voir à Venise en première mondiale !
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