C’est un heureux hasard – ou un vrai choix – d’avoir implanté le studio MADO XR au cœur des studios d’Epinay-Sur-Seine détenus par la société TSF, fondées voici plus de 100 ans et emblème du cinéma français et international. Si son imposante myriade d’écrans LED, incurvée, souligne la modernité de l’installation, c’est pour mieux asseoir une volonté de vrai plateau de tournage aux possibilités infinies.
Retour sur MADO XR avec son co-fondateur Lancelot Rumney-Guggenheim.
Cover: Balmain shooting @ MADO XR
MADO XR, une création en période COVID
Lancelot Rumney-Guggenheim – Avec mon associé Louis de Castro nous avons des parcours complémentaires. Louis menant une carrière d’artiste plasticien sous le pseudonyme “Marc Ippon De Ronda” et directeur de création d’ATO Designs, société de production événementielle spécialisée dans la scénographie. Pour ma part j’ai été directeur de production pour des événements de grandes ampleurs pour des maisons de coutures et des institutions culturelles ces 10 dernières années. Nos chemins se sont croisés et Louis m’a invité à rejoindre sa structure ATO Designs..
L. R.-G. – C’est de retour d’une production à Los Angeles pour les Golden Globes que Louis a commencé à me parler des possibilités de la technologie LED, largement utilisée sur des séries telles que THE MANDALORIAN (Disney+). Pour Louis, qui est un créatif, réalisateur, c’est fascinant. Nous avons commencé par discuter avec Lux Machina, qui a développé cette technologie pour Disney, et Epic Games. Mais la réalité de la situation sanitaire à l’époque a compliqué les choses.
L. R.-G. – Nous nous sommes alors lancés seuls pour créer MADO XR – le contexte nous offrait une chose, le temps pour travailler sur ce nouveau projet. Et toutes les ressources humaines nécessaires existent chez nous, en France ! Nous avons donc commencé à développer notre propre solution, les briques technologiques. Tout a commencé dans nos bureaux avec quelques écrans et capteurs. C’était nécessaire pour ensuite aller à la rencontre des grands acteurs du marché, ceux susceptibles de nous aider , qui utilisent déjà ces technologies – notamment Production Resource Group ou PRG (premier fournisseur mondial de technologies d’événement, ndlr), Nvidia pour les accélérateurs graphiques et Arri pour les caméras, puis Epic Games. Pouvoir collaborer avec eux a permis d’accélérer le développement des outils et de l’expertise de MADO XR.
L. R.-G. – Il faut évangéliser sur les technologies XR, le temps réel. Notamment pour les écoles. Nous sommes à l’aube d’une révolution, qui va faire évoluer les métiers de l’industrie de l’image. Avant on devait tout pré-calculer… Avec le temps réel, c’est un gain de temps et un confort énorme pour les productions. Le frein du studio XR aujourd’hui n’est pas tellement budgétaire. Il y a une vraie ambition d’aider les projets innovants, pour trouver les moyens de production de demain. Il y a beaucoup à imaginer. Les barrières créatives tombent une à une ; c’est notre imagination qui doit se développer.
De Méliès à MADO XR
L. R.-G. – Être hébergé aux studios d’Epinay, ça fait partie du chemin de MADO. Au départ, on a écrit un proof-of-concept, réalisé un prototype avec Mathias Chelebourg et devant l’écran la danseuse Fanny Sage. C’était un plan séquence (avec un Steadicam TRINITY d’Arri) qu’on a tourné plusieurs par jours, sur une semaine, pour présenter cette démo à de potentiels clients. On leur montrait la séquence filmée, puis ils venaient en plateau pour comprendre la façon dont on travaillait. Et puis tout s’est accéléré. D’une part, on a montré que notre système fonctionnait et était stable. D’autre part, on a reçu des premières demandes de tournage ! C’est là que l’idée d’un vrai studio de cinéma a fait sens, pour des raisons pratiques et d’identité. Les studios d’Epinay sont les plus vieux au monde, George Méliès y a tourné en 1917. TSF et PRG nous ont aidé à rendre cela possible.
L. R.-G. – On a travaillé pour des groupes industriels, des maisons de coutures, des artistes musicaux qui ont accueilli l’innovation et les capacités des technologies XR. Côté fiction, il s’agit de développements au long cours. Les attentes côté cinéma peuvent être élevées (côté colorimétrie, image, relation caméra/écran..) mais on a déjà prouvé que MADO XR pouvait tout à fait s’adapter à ça. On travaille sur des cas d’étude pour expliquer tout cela, on intervient dès le développement de certains projets audiovisuels pour mettre en place une méthode de travail adaptée à ce nouvel outil.
Étendre la réalité … et la fiction
L. R.-G. – Dans le MANDALORIAN, il y a un parti pris de tout faire en XR ou presque – et c’était sans doute un enjeu de production mais aussi de promotion des technologies utilisées. Pour nous, il ne s’agit pas de survendre nos compétences : MADO XR est idéal pour certains types de plans, mais n’exclut pas les tournages traditionnels en extérieur. De notre côté, on maîtrise les aléas de climat, les “golden hours” de lever ou coucher de soleil par exemple – on peut les reproduire à l’infini. La mise en place d’outils tels que le pre-viz ou techviz permet de mieux préparer les tournage. Nous pouvons alors en amont positionner la physicalité de l’action et donc le décors réel. Le relation entre le décor physique et virtuel est la clé de l’immersion du sujet dans l’image.
L. R.-G. – Notre technologie s’adresse à toutes les industries qui produisent des images. Le live et le théâtre immersif sont des cas passionnants pour nous,il s’agit là de nouveau format où on peut intégrer des environnements et VFX en temps réel pendant la performance. On passe désormais plus de temps en pré-production avec les équipes concernées. Il faut réfléchir à de nouveaux formats, mettre en place un workflow efficace pour que l’accès à ces nouvelles technologies soit facilité.
Penser la XR sur la durée
L. R.-G. – Le secteur de la production XR se développe fortement en Europe – avec quelques gros studios qui s’implantent en Allemagne, en Espagne… Avec MADO XR, nous n’avions pas vocation à opérer le studio, mais la demande était trop forte. Du coup ça nous permet de tester nos outils, de travailler des méthodes de production (techviz, préviz, physicalité des plans…). De belles innovations sont à venir. Stay tuned.
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