Ancien de chez Microsoft, entrepreneur de la culture numérique, Alexandre Michelin est au cœur de la XR française depuis l’an dernier comme président de la commission du Fonds d’aide aux Expériences Numériques au CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée). Mais c’est bien pour la première édition de du KIF (Knowledge Immersive Forum) que nous l’avons rencontré ; un nouveau rendez-vous établi en région Grand Est qui se déroulera du 1er au 4 septembre prochain.
Cover : Le Centre Pompidou-Metz
Le KIF, le forum de la réflexion XR
Alexandre Michelin – De par mon expérience dans l’audiovisuel, mais aussi avec Microsoft/MSN, je me suis intéressé très tôt aux nouveaux espaces de création numérique – ce qui m’a amené à co-créer notamment en 2015 la plateforme documentaire Spicee, et à réfléchir à comment proposer de nouvelles formes de documentaires. A partir de là, j’ai commencé à m’intéresser aux technologies immersives (à toutes les possibilités du spatial computing, des images enrichies) en accompagnant le festival « Sunny Side of the Doc » sur la création d’un nouveau rendez-vous qui allait devenir le « PiXii Festival » (voir la programmation 2021). Voir arriver ces nouvelles possibilités de création, ça a gagné ma passion pour la science-fiction.
A. M. – J’ai eu envie de proposer un nouveau rendez-vous sur toutes ces possibilités de création “augmentée”, et c’est avec la région Grand-Est que le dialogue s’est engagé – par le biais d’Emmanuelle Brandenburger (Cheffe du service Industries créatives, Région Grand Est), Pascal Mangin (Président de la Commission Culture, Région Grand Est) notamment – pour pousser nos réflexions sur ces univers virtuels, sur la transformation culturelle et les écosystèmes associés. Cela a du sens, tant cette région est un bassin industriel en recherche constante d’innovations. Il y a des industries technologiques de pointe qui existent déjà sur place. Une synergie a été trouvée entre le KIF et le festival d’art numérique Constellations de Metz (lien) pour exister sur la même période – même si notre lancement 2020 a été retardé par la pandémie. Le premier KIF aura donc lieu du 1er au 4 septembre 2021.
Proposer un rendez-vous professionnel en région Grand Est
A. M. – En s’implantant dans cette région, on a la chance de bénéficier d’un écosystème déjà existant – un festival numérique tourné vers le grand public, des acteurs publics impliqués – mais aussi des chercheurs. A l’université de Lorraine (Sébastien Genvo du CREM notamment) des nouvelles formes de narrations sont étudiées. Des étudiants œuvrent sur les techniques du jeu pour les transposer dans ces nouveaux univers spatialisés. Quand on voit autant d’initiatives locales, tant d’énergies créatives, on sait que c’est là pour durer !
A. M. – Le KIF invente un lieu, un espace, une plateforme pour décloisonner les sujets immersifs. Nous ne sommes pas là pour faire concurrence à de grands événements internationaux comme « Laval Virtual », ou d’autres festivals comme « NewImages » qui soutiennent la création. Notre objectif est vraiment cette notion de forum, de réunir les gens pour discuter de ces sujets, en dehors de toutes actualités. Le KIF souhaite créer la réflexion pour convaincre aussi les investisseurs de l’intérêt de ces secteurs, consolider les filières. Et dans ce bel écrin de la culture qu’est le Centre Pompidou-Metz, pour accueillir un vrai rendez-vous convivial et en présentiel.
Accélérer l’essor des industries XR
A. M. – L’intérêt des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft ) est de plus en plus croissant, et c’est un point d’intérêt important pour la XR au sens large. Facebook, Apple, Google, Snapchat… Pour eux, et pour d’autres, l’objectif est à 10 ans de modifier notre quotidien : deep tech, AI… L’environnement technologique évolue fortement, et il faut se poser les bonnes questions de cette transformation en profondeur. Tout le monde prend conscience des enjeux à venir dans le domaine des technologies virtuelles. La France est un pays où l’ingénierie, la recherche sur ces technologies innovantes existent depuis longtemps. C’est un atout pour avancer rapidement, et tous ensembles. Le maillage géographique de nos entreprises impliquées dans la XR est exceptionnel. Sans oublier le soutien des institutions, des acteurs publics.
A. M. – La France, c’est notamment deux industries créatives fortes : le jeu vidéo et l’animation, avec un foisonnement d’écoles sur lesquelles il faut s’appuyer. Le potentiel des applications XR, c’est la créativité au service de notre quotidien, pour le patrimoine ou le tourisme par exemple. Et ça existe déjà aujourd’hui, avec de vrais débouchés ! Il y a évidemment des modèles économiques, des circuits de distribution, à trouver pour la XR artistique. Mais si on regarde le cinéma, il a fallu attendre plusieurs dizaines d’années pour que les choses se mettent en place. Andy Warhol a bien commencé par faire du marketing, avant de passer à des créations purement artistiques. Il n’y a qu’à voir l’hybridation en cours des contenus. Des documentaires deviennent des œuvres interactives exposées dans les musées, peuvent aider à faire de l’éducation avec du son spatialisé et du gaming.
Présider le Fonds d’aide aux Expériences Numériques
A. M. – Faire partie de la commission Fonds d’aide aux Expériences Numériques (CNC) est très intéressant en ce moment, car on note une vraie montée en puissance des productions aidées. Il y a un haut niveau de création en France côté XR, qu’il faut entretenir. La période du confinement dans un contexte sanitaire lié au Covid a permis des phases de développement, d’écriture. Et ça n’est plus de l’expérimental, notamment avec l’intérêt de certaines institutions comme les musées pour ces nouvelles écritures.
A. M. – De plus, les récentes récompenses mondiales des projets français témoignent d’une vraie envie des professionnels du cinéma et de la télévision pour les formats immersifs. On assiste à une nouvelle vague de projets qui arrivent, et qui seront très engageants. Les nouvelles générations de spectateurs vont aussi être totalement habituées aux formats immersifs – merci Snapchat et la réalité augmentée. Nous n’en sommes qu’au début… en espérant que cela motive les créateurs à explorer la XR au sens large ! Présider la commission du CNC, c’est une chance inouïe d’être au cœur de ce foisonnement artistique.
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