Studio de production parisien, BackLight s’est spécialisé dans les contenus de divertissement destinés au marché LBE, étant à la fois présent dans des salles d’arcade (en Europe ou à l’Area15 de Las Vegas) mais aussi sur des projets plus artistiques tels que LE BAL DE PARIS de Blanca Li – récompensé lors de la Mostra de Venise 2021. Retour sur la promesse d’une VR très physique à l’occasion de la sortie de leur dernière expérience ASCENDERS, avec son co-fondateur Frédéric Lecompte.
2008 – 2010, les débuts
Frédéric Lecompte – BackLight, c’est quasiment un projet de fin d’études ! J’ai créé la société en 2008 avec Jonathan Tamene (voir notre interview sur LE BAL DE PARIS), que j’ai rencontré dans un studio de jeu vidéo où je suis arrivé en stage, Gimagin. Et c’est d’ailleurs au même endroit que nous avons rencontré la plupart des gens qui allaient constituer BackLight (et sont toujours là !), venant pour la plupart de l’Institut Supérieur des Arts Appliqués (LISAA). On faisait principalement des jeux à licence, ce qui a été très formateur mais on imaginait déjà autre chose. Après mon stage, j’ai conservé l’envie de travailler dans le secteur du jeu vidéo, mais en voulant innover et être très proche des équipes de production. J’ai même refusé un stage chez Nintendo !
F. L. – On s’est donc associé avec Jonathan pour fonder BackLight (le nom a été trouvé par notre réalisateur Jonathan Astruc) – en pleine période de crise financière. On voulait produire de bons contenus numériques, 3D, dans un contexte où on faisait de plus en plus appel à ces productions pour des marques, des institutions. Là-aussi, ça a été l’opportunité de prouver la qualité de nos travaux dans des contraintes de budget, de production. Une vraie chance pour aller ensuite vers des projets plus artistiques.
F. L. – En 2008, on s’est immédiatement spécialisé sur de l’animation pré-calculée et les effets spéciaux pour des productions numériques et principalement la publicité en ligne. On arrive aujourd’hui à 400 projets livrés en 15 ans, tous supports confondus. Mais dès 2008 on s’est rapproché d’une société déjà leader en réalité augmentée, française, qui s’appelait Total Immersion (lien – fermée en 2014). Avec notre expérience du jeu vidéo et du temps réel, on a commencé à collaborer avec eux, pour produire des assets incluant les contraintes de l’AR. Et c’était le début des smartphones !
2010 – 2014, l’arrivée de la réalité virtuelle
F. L. – En 2010, nous sommes devenus partenaires de Total Immersion, et BackLight a pu commencer à développer ses propres applications AR. On a embauché notre premier salarié, Frédéric Plantard, désormais directeur technique, pour travailler sur ces projets. C’est dans ce mouvement que nous avons pu tester le DK1 d’Oculus dès 2013, et voir les opportunités que cela pouvait offrir – avec un brin de frustration sur l’absence d’interactivité. On est entré en contact avec eux, et avons reçu un kit de développement pour pouvoir prototyper. L’arrivée du DK2 et sa caméra de tracking a été un vrai changement pour nous comme potentiel de création mais aussi de la part de certains clients.
F. L. – A ce moment-là, on a décidé de passer un de nos prototypes en production : BIRDY KING LAND, qui est sorti en décembre 2014 – et nous a permis de signer plusieurs commandes. Le studio a progressivement migré vers la XR ; nous avons mis fin aux commandes purement animation et effets spéciaux en 2018. Nous avions atteint le bon moment pour nous focaliser sur la XR, avec la certitude que nos compétences créatives étaient assez mûres. Et le marché était relativement prêt, entre Pokémon Go qui a fait découvrir l’AR au monde entier, et les premières expériences VR pour les marques. Les productions institutionnelles, ou brand content, nous ont permis de nous spécialiser et acquérir suffisamment d’autonomie.
2017 – 2020, vive le LBE !
F. L. – La tendance du LBE, on l’a identifiée assez vite. Pour les salles de divertissement, c’était l’occasion de diversifier les contenus, leurs offres. Dès 2017, après avoir beaucoup discuté avec les parcs d’attractions et les salles d’escape game, nous avons signé ECLIPSE. Le Location-based, c’est la continuité organique de nos travaux précédents. Entre jeu vidéo, animation, moteur temps réel, nous avions la bonne boîte à outils. Et une frustration de ne pas pouvoir, jusqu’alors, être totalement libres de vivre les expériences ! L’arrivée du HTC Vive a été très bénéfique pour cela. Toutes ces évolutions technologiques, nous les avons intégrées dans notre pipeline de “hyper-réalité” (augmentation de l’expérience virtuelle grâce à des dispositifs haptiques de l’environnement réel : sols vibrants, ventilation… etc.) dès 2015 au salon du Bourget (lien).
F. L. – Ces premiers essais nous ont convaincus que c’était ce que nous voulions explorer créativement et en termes de production. L’une de nos meilleures expériences à ce jour reste DIESEL – ONLY THE BRAVE en 2017, où le spectateur se retrouve à 50 étages au-dessus du sol… Une sensation assez stupéfiante alors qu’on a les deux pieds sur la terre ferme ! Pour proposer une immersion complète, il faut stimuler plusieurs sens – et pas que la vue ou le son, par le biais de différentes haptiques disponibles (vibrations, free roaming…). C’est un savoir faire que nous avons développé ensuite pour le divertissement. ECLIPSE est disponible en expérience “à la maison” ou dans des salles d’arcade simples (+120 aujourd’hui dans le monde l’utilisent comme cela), mais la vraie expérience est totalement interactive et 4D avec des supports haptiques dédiés, et en déplacement libre (sans téléportation). C’est notre vrai objectif : on veut que les gens s’évadent et oublient le casque de réalité virtuelle sur leur tête.
2020 – …, LE BAL DE PARIS, AREA15 et Covid
F. L. – Les années Covid ont été dramatiques ; on paye toujours l’arrêt de l’exploitation LBE – même si le réseau est reparti avec de bons indicateurs. On avait évidemment beaucoup misé sur le divertissement en free roaming : avec les salles de divertissement, les prestations de service en événementiel et l’animation en point de vente et nous avions également investi directement dans des lieux. Il y avait par ailleurs un potentiel à l’international avec de gros budgets en discussion à ce moment-là. Tout s’est brusquement arrêté au printemps 2020, sans grande visibilité pour la suite. Mais on a tenu le coup, notamment grâce aux aides de l’État, et on s’est organisé pour continuer les projets en production. Les deux années suivantes ont été compliquées (on a dû refuser tous les projets de coproduction pour se focaliser sur nos propres expériences, des prestations de services ou du brand content pour Disney et autres marques) mais ça redémarre depuis 2022 avec l’essor de la XR, le succès du BAL DE PARIS de Blanca Li et le buzz “metaverse”.
F. L. – L’implantation d’une salle OZ Experience chez AREA15, complexe dédié à l’immersion près de Las Vegas, a été actée au printemps 2020, juste après les confinements. Elle a ouvert en décembre 2020, et a été ouverte jusqu’à mi-2021, en exploitant nos contenus (notamment ECLIPSE). On avoisine les 100 000 spectateurs sur cette période, et un proof-of-value de notre concept OZ Experience : la réunion de tout notre catalogue LBE, qui illustre notre vision de l’immersion. On a eu la chance d’avoir un lieu très visité, sur un modèle premium, qui nous a permis de rentabiliser cette opération.
F. L. – Aujourd’hui OZ Experience est la marque qui exploite nos contenus de divertissement, avec un réseau de salles partenaires. OZ, c’est une quinzaine d’expériences : 5 installations et une dizaine de licences. Mais on ambitionne clairement d’ouvrir une salle OZ Experience que nous pourrions exploiter en direct pour développer cette activité, intégrer notre package et l’ouvrir à d’autres producteurs. On veut que ça soit ouvert à tous, avec une ligne conductrice en termes de qualité d’immersion.
BackLight announces OZ EXPERIENCE, an all-in-one entertainment LBE catalog
F. L. – La standardisation des supports de diffusion est une question centrale pour le Location Based. C’est une discussion que nous avons avec les studios XR français au sein de notre association French Immersive Studios (lien), axée plutôt autour des expériences artistiques et patrimoniales. La XR est l’un des axes intégrés au plan France 2030 que le gouvernement a mis en place, et nous avons été largement consultés sur ces points. Dans la chaîne de valeur de la XR, c’est clairement la distribution et l’exploitation qui restent les maillons faibles. En production, la France est déjà parmi les leaders du marché. Il faut désormais pouvoir “cracker” le code de la diffusion pour créer de la valeur. C’est un point bloquant.
F. L. – Le potentiel du LBE est là. Mais on n’a pas de données encore précises sur l’état du réseau après le Covid. Chez BackLight, on dispose par exemple d’une plateforme technologique nous permettant de suivre les performances de nos expériences qui sont en exploitation, et de les sécuriser – mais cela reste parcellaire par rapport au marché global. Avec la démocratisation des casques, les nouveaux lieux dédiés, il faut pouvoir suivre le rythme. Et discuter avec les salles d’arcade qui vont devoir fidéliser un public, renouveler leurs expériences. Depuis la fin 2021, on sent que la dynamique est là.
BackLight, à suivre
F. L. – Nous faisons une très belle année 2022. Au delà de nos traditionnels projets pour des marques, nous sommes très fiers de 2 de nos récentes créations, le Survol de la France avec FLYVIEW (lien), et tout récemment une expérience de XR à la télévision avec Gulli et l’émission “Mission Gulliverse” (lien).
Plus d’infos : https://backlight.fr/xrprojects/
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