Le PiXii Festival revient cette année pour une édition à nouveau 100% physique à la Rochelle. Événement dédié à la création documentaire, PiXii n’a pas démérité depuis la crise sanitaire en proposant une programmation dans différents lieux (musées, institutions..) et cette année un partenariat avec la RMN-GP autour de l’exposition Palais augmenté 2 (en réalité augmentée, donc). Retour sur l’édition 2022 de PiXii avec Stéphane Malagnac, son directeur.
https://www.pixii-larochelle.fr
PiXii, un festival au coeur de La Rochelle
Stéphane Malagnac – On a fait le constat en 2020 que nous faisions venir des opérateurs culturels internationaux pour découvrir nos projets… mais sans forcément solliciter ceux du territoire. Pour l’édition 2021, on leur a donc proposé de nous accompagner, de devenir des écrins pour le PiXii festival, et ils ont tout de suite répondu positivement et de façon assez active – et ce dans un contexte où on a eu la chance de pouvoir organiser une édition physique. Notre interview 2021 – “Sunny Side of the Doc a toujours été un événement où de nouveaux projets sont nés” – Stéphane Malagnac (PiXii Festival)
S. M. – Sur le principe d’un festival dans la ville, avec plusieurs lieux pour l’accueillir, l’édition 2021 a été un succès public et critique (de la part des opérateurs culturels, des bailleurs de fonds, des collectivités, des producteurs). On permettait de découvrir, ou redécouvrir, La Rochelle. Et en réalité, nous avons vu les portes s’ouvrir plutôt facilement, avec de la curiosité et de l’intérêt pour l’innovation portée par la XR et notre programmation. L’édition 2022 du 18 au 23 juin confirme donc notre implantation, avec un changement dans la liste des lieux retenus selon les agendas et possibilités de chacun, et toujours sur le principe d’un événement 100% gratuit pour les visiteurs.
Les lieux : Église Saint-Sauveur, Hôtel de Ville, Tour de la Chaîne Centre des Monuments Nationaux,Musée du Nouveau Monde, Museum d’histoire naturelle, Maison Henri 2 Centre Intermondes, Office de tourisme
S. M. – L’édition 2021 nous a énormément appris. En premier lieu, nous avons pu nous ouvrir au grand public, là où précédemment nous ne parlions qu’aux professionnels. Mais il faut réveiller la “bulle” immersive, et aller chercher de vrais spectateurs. Il y a certes un travail de pédagogie à continuer vers les professionnels, mais ils sont désormais habitués à voir des casques VR dans les salons ou à côté des conférences qu’ils fréquentent. Et c’est aussi une façon de prouver que ça peut fonctionner, que le public se déplace toujours dans des institutions culturelles et découvrir à la fois notre programmation et visiter les lieux partenaires. Et c’est parfait à La Rochelle où tout est à quelques minutes à pied de distance. Donc on est véritablement dans une dynamique culturelle innovante et touristique.
Vers une maturité de la XR en festivals ?
S. M. – La maturité, elle vient de la part des opérateurs culturels. On commence à voir arriver des projets numériques d’envergure de la part des institutions en place, et ce dans toute la France. Quand PiXii a été créé en 2017, on ne pouvait imaginer cela. Produire ou co-produire une œuvre, réunir un budget pour un musée régional, c’est difficile. Mais l’exemple des plus grands (RMN-GP, etc.) fait envie, et démontre qu’il y a des choses possibles. Une dynamique de marché se met en place, et un dialogue entre institutions et producteurs XR.
S. M. – ÉTERNELLE NOTRE-DAME, LADY SAPIENS… Ce sont autant d’exemples d’expériences XR collectives, avec un flux de visiteurs, même si on constate que ce sont encore de grosses machines – financièrement et techniquement. Pour autant, on voit l’influence que ça peut avoir sur des opérateurs de moindre envergure, et la possibilité de commencer à imaginer des exploitations d’œuvres immersives sur une moyenne ou longue durée.
S. M. – Au Sunny Side of the Doc, on est très heureux d’avoir des gens du jeu vidéo comme Ubisoft présent depuis plusieurs années. Ce n’est pas tant l’envie de créer des ponts avec le jeu vidéo, mais d’en explorer l’utilité pour nos producteurs : production d’environnement 3D, d’assets numériques produits avec une véracité scientifique. Et on en a besoin ! C’est plus difficile de faire venir des éditeurs de jeux vidéo. Tout ceci se construit petit à petit…
PiXii 2022 : la sélection
S. M. – Le PiXii Festival, c’est avant tout une synergie avec Sunny Side of the Doc évidemment. On veut être une résonance des tendances audiovisuelles pour le documentaire. On a eu plusieurs centaines de projets qui ont été proposés pour des sessions de pitch à Sunny Side : on a choisi les projets avec en tête une sorte de logline “New Voices” pour pouvoir soutenir des nouveaux entrants dans le secteur, sur des sujets qu’on entend peu.
S. M. – Sujets sociaux, sociétaux, environnementaux, féministe, population discriminée, nouveaux territoires.. On ne sera pas dans la légèreté ! Les créateurs-rices ont des idées fortes que nous souhaitons défendre. La sélection officielle est vraiment le reflet de ça. Et ce n’est pas une volonté expresse de ma part puisque le jury est composé des représentants des lieux culturels, de partenaires et de professionnels. De mon point de vue, c’est vraiment l’immersion proposée qui peut permettre de mieux appréhender certains sujets. Le documentaire classique, le podcast, sont des formats moins immersifs. La XR apporte un vecteur d’appréhension meilleure, une présence.
S. M. – Si je dois prendre un peu de hauteur, l’idée est surtout d’être un moyen de faire avancer les projets. De mettre tous ensemble les talents, producteurs et diffuseurs, dans les meilleures conditions possibles pour que les idées circulent, pour qu’on discute budget et que les œuvres terminées se vendent. La XR n’est plus reléguée au “village des geeks”, mais est totalement intégrée au marché global. L’innovation qu’elle apporte est bénéfique pour tout le monde, y compris le public. Aujourd’hui un producteur de documentaire linéaire peut vouloir lancer un segment immersif, un podcast, une série web-doc, etc. C’est notre travail au Sunny Side of the Doc de casser les cloisons, de faire en sorte que tout le monde se rencontre, et créer des écosystèmes transmedia comme on a pu le voir récemment avec LADY SAPIENS. Et d’autres exemples existent.
Compétition 2022
- The Choice (2021) Canada, Poland
- The Starry Sand Beach (2021) France
- When She Gets Out … (2021) France
- Noire (2022) France
- MYRIAD. Where we connect. (2021) Canada, China, Germany, South Africa, Zambia
- Genesis (2021) Germany
- Hydrocosmos (2021) Italy
- Suppliques Stories (2022) France
- A Colônia Luxemburguesa (2022) Luxembourg
- Plastic on the Ganges (2022) India
Hors-Compétition 2022
- The Dawn of Art (2020) France
- Mona Lisa: Beyond the Glass (2020)
- Notre-Dame de Paris: Journey Back in Time (2020) France
La création immersive passe-t-elle forcément par des œuvres à impact ?
S. M. – La XR “for good” ou à impact est inscrite dans notre sélection, car c’est un vrai mouvement de fond. Quasiment tous les projets qui circulent en festival s’inscrivent dedans. Une expérience XR seule n’est pas viable économiquement ; elle doit proposer quelque chose qui va intéresser les diffuseurs, les plateformes et entraîner une discussion plus globale. C’est à mon sens ce qu’il se passe aujourd’hui chez un diffuseur comme France télévisions, et ailleurs dans le monde : avoir une vraie stratégie de production tous département confondus. On en revient à l’idée même du transmedia ! Quand on voit que Spotify France produit un podcast de fiction sur Batman, on se dit que tout est possible. De passer de la fiction au documentaire, de la VR au sonore, du live en ligne aux lieux… Même si tout cela doit être porté avant tout par une envie d’histoire, et une base économique.
S. M. – La Compétition, sélectionnée par un jury de professionnels, est révélatrice de cet état de fait avec notamment une production de National Geographic au titre révélateur : PLASTIC ON THE GANGES. Nous avons une œuvre VR en capture volumétrique réalisée par une jeune réalisatrice-productrice (Joanne Popińska), THE CHOICE, autour ddes choix fondamentaux des femmes. Le premier épisode parle de l’avortement aux Etats-Unis, dans un contexte de diffusion qui en renforce la réalité et l’émotion. On va avoir aussi de la réalité augmentée (AR) avec SUPPLIQUES STORIES, soutenue par France tv lab (lien), autour des lettres qui ont été adressées par la population juive de Paris au gouvernement de Vichy pendant la Seconde Guerre mondiale. Et également en AR, NOIRE, qui revient sur un fait historique : avant Rosa Parks, une autre jeune femme noire a refusé de laisser son siège dans un bus.
S. M. – Nous proposons aussi une partie Hors-Compétition qui revient sur des œuvres déjà connues de l’industrie, mais pas forcément du grand public. DAWN OF THE ART autour de la grotte Chauvet, une exploration de Notre-Dame basée sur un jeu Assassin’s Creed d’Ubisoft… Et cette année nous sommes heureux d’accueillir l’exposition Palais augmenté 2 en partenariat avec la RMN-Grand Palais, en parallèle de sa présentation à Paris (voir notre interview de Roei Amit, son directeur).
Une industrie en redémarrage après la Covid-19
S. M. – La crise sanitaire a forcément impacté l’industrie XR, qui a été très dynamique au cœur des événements. On voit les diffuseurs revoir leur stratégie, des acteurs culturels s’ouvrir à nouveau aux expérimentations, des studios qui se restructurent… On gagne en ambition, avec certains producteurs qui restent les locomotives de l’industrie immersive. Et qui ouvrent des filiales dédiées à la distribution ! C’est un fait majeur de voir de vrais opérateurs XR de la diffusion/distribution. Chez PiXii, on note surtout l’arrivée de projets au Pitch venant de nombreux pays, d’Europe de l’Est, Afrique, d’Espagne… On veut soutenir l’effort de territoires émergents, et c’est pour cela qu’en 2022 notre session de pitchs autour des projets numériques est intitulée “New Voices”.
Immersive Experiences Pitch
Digital Na(rra)tive Stories Pitch
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